Duc d’Auerstaedt (1808), prince d’Eckmühl (1809) et né à Annoux, le maréchal Louis-Nicolas Davout (1770-1823) n’aura jamais connu la défaite sur un champ de bataille. Quelques-uns de ses objets personnels brilleront à Paris pour le bicentenaire de la mort (le 5 mai 1821) de Napoléon Ier. À Auxerre, la sublime salle d’Eckmühl, créée par Louise-Adélaïde de Blocqueville, fille de Davout, renferme des trésors d’histoire et notamment une bibliothèque de 2.500 ouvrages.
Présentes depuis 1882 et l’ouverture de la salle auxerroise, cinq pièces exceptionnelles rejoindront en avril La Villette pour l’exposition Napoléon.
1. Manteau et ceinture de cérémonie.« Pour son sacre (le 2 décembre 1804 en la cathédrale de Notre-Dame de Paris, ndlr), Napoléon ne voulait pas que les dignitaires militaires aient des tenues militaires pour les cérémonies civiles. Il a donc demandé à Isabey, miniaturiste, de dessiner un costume que pourraient avoir tous les maréchaux », explique Stéphanie Guyot, conservateur de la salle d’Eckmühl.
Porté par Davout ce jour-là, ce prestigieux manteau de cérémonie fait partie d’un ensemble. Ici, pas de pantalon, de chemise et de veste revêtus sous le manteau. « En exemplaires d’origine, dans le monde, il y a celui-ci et celui du maréchal Ney acheté par le musée de l’Armée, dit Stéphanie Guyot. On en connaît, pour deux autres, uniquement les broderies. »
Au col relevé, du moins celui-ci, le manteau en velours de soie et initialement bleu foncé a un peu « grisé, verdi, terni ». Pas de quoi effacer les broderies en fil d’or, reprenant des feuilles de chêne et des glands, l’intérieur en satin de soie, ainsi que le bouillon qui retient le vêtement.
« Dans le tableau Le Sacre de Napoléon, de David, vous avez l’impression d’uniformité et c’est ce que voulait Napoléon. Sauf qu’il y a des subtilités : plus vous étiez proche de la famille impériale, plus vous aviez des textiles précieux qui composaient votre uniforme. Exemple avec Eugène de Bauharnais, avec de la moire pour les revers. Pour l’empereur, c’est le même manteau mais rouge. »
Elle aussi conservée à Auxerre et prêtée, la ceinture, large et posée autrefois sur la veste, se compose de satin de soie pour les doublures et de fils d’or. Les représentations se succèdent : canne de maréchal, couronne impériale, blasons de Napoléon, branches de laurier…
2. Canne de maréchal et glaive d’apparat. Troisième objet du « maréchal de fer » Davout attendu à l’exposition Napoléon, sa canne bleu marine de maréchal était « portée à cheval, avec une partie posée sur la cuisse ». Constitué de bois et de velours de soie sur le dessus, l’accessoire impérial est orné de 44 abeilles de vermeil. L’abeille, « le plus vieux symbole de royauté en France », précise Stéphanie Guyot. Palmettes, fleurs et baies de laurier, entre autres, se mêlent au niveau du pommeau.
Un glaive d’apparat, inutile au combat, vient accessoiriser le manteau de cérémonie. L’intérieur est en bois, l’extérieur en acier bleui. Décors en bronze doré, poignée en nacre et lame en acier damasquiné en imposent. Outre les éclairs, références à la guerre, on aperçoit des têtes de lion. « Au Premier Empire, le lion pouvait être représenté avec une gueule fermée (signe de sagesse) ou ouverte (signe de courage) », nuance la responsable de la salle d’Eckmühl.
3. Bicorne de la bataille d’Auerstaedt. Durant la déterminante bataille d’Auerstaedt (1806), le bicorne à cocarde du maréchal Davout, en feutre sur sa partie noire, fut soufflé par un biscayen, un petit boulet. « Le souffle est passé près. Le maréchal était à cheval et le bicorne s’est envolé. Pour des férus de Napoléon et de Davout, il est dit que le biscayen aurait traversé le chapeau », signale Stéphanie Guyot. « Là commence la légende », sourit Delphine Lannaud, directrice des musées d’art et d’histoire de la Ville d’Auxerre.
Le trou dans le bicorne suscite en effet une deuxième version, a priori plus crédible. Selon le journal de bord du général Trobriand (parfois chargé d’écrire les lettres adressées par le maréchal à son épouse, ndlr), Davout serait descendu de cheval très en colère et aurait trépigné son bicorne. « Mais pour accentuer la légende, Trobriand aurait envoyé à la maréchale un deuxième bicorne qu’il aurait lui-même percé », poursuit Stéphanie Guyot.
Entretenir des faits d’armes, voire romancer une anecdote de champ de bataille. Rien d’étonnant, en somme, même au sein des proches. « Après le décès du maréchal, tous les 14 octobre, date de la bataille d’Auerstaedt, le général Trobriand venait à Savigny-sur-Orge, le domaine familial des Davout, pour raconter la bataille à la famille réunie. On imagine bien qu’au fil des ans, il y a pu avoir des choses modifiées, changées… »
Parmi les trouvailles portées par Davout et attendues à l’exposition du bicentenaire de la mort de l’empereur : un bicorne de la bataille d’Auerstaedt (1806), dont un trou alimente plusieurs versions. © Vincent THOMAS
Le manteau de cérémonie, porté par le maréchal Davout lors du sacre de Napoléon Ier en 1804, est exposé à la salle d’Eckmühl à Auxerre, ouverte en 1882 et créée par sa fille. (photo V. T.)
Constituée de bois et de velours de soie sur le dessus, la canne de maréchal est ornée de 44 abeilles de vermeil. L’abeille, « le plus vieux symbole de royauté en France », précise Stéphanie Guyot. (photo V. T.)
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